Non, l’innovation n’est pas dans les outils !

Nous avons écouté récemment le directeur de Pole Emploi lors d’une matinale sur France Inter. A chaque émission sur le sujet de l’emploi et du chômage, la frustration reste la même et s’amplifie s’il faut réduire sa réaction aux 140 caractères de Twitter. D’où ce billet.

Certes, on y entend quelques vérités que nous observons dans nos accompagnements. Ainsi ce directeur a raison lorsqu’il nous dit « ça va mieux sur le marché de l’emploi ».

Certes, nous partageons son avis lorsqu’il explique que le chômeur a besoin d’une plus grande personnalisation dans son suivi pour lui permettre de retrouver un emploi.

Mais au fur à mesure que s’égrène le discours, le doute s’installe progressivement devant tant de propos contradictoires. Il semblerait que nous ayons investi dans les remèdes, pour le diagnostic on verra plus tard !

Ainsi, se félicite-t’on de la création d’une toute nouvelle plateforme numérique dont on peut croire qu’elle peut faciliter la vie de certains demandeurs, mais dans le même temps, entend-t-on des gens sur le terrain qui s’expriment sur la difficulté pour certains à avoir accès à internet ou à savoir l’utiliser.

Certes, on nous explique que c’est pour leur bien et qu’ils peuvent être formés à l’utilisation des outils, mais dans le même temps, écoute-t-on le commentaire du journaliste émettre l’hypothèse que ce pourrait être une explication quant à la baisse des statistiques.

Et nous de penser: « c’est sans doute là, la personnalisation du suivi qu’ils entendent mettre en place ».

Le pathétique (pour finir) vient en toute fin d’émission lorsqu’avec une touche d’émotion, on en arrive à évoquer l’exclusion sociale et la solitude du chômeur. On reste coi !

L’exclusion sociale du chômeur tient à son isolement et à son absence d’interaction humaine pour l’aider à construire son projet professionnel. Son retour vers l’emploi passe par un cercle vertueux d’actions, de réflexions, d’interactions qui se confrontent à un écosystème et lui permettent de revenir à la vie active.

Toute politique ou initiative concernant l’emploi devrait partir de cette réalité. Au vu de ce que nous observons sur le thème de l’emploi et du chômage, il semblerait que l’innovation se résume à du digital washing : l’innovation n’est pas dans la politique mais dans les outils.

L’outplacement chez Eurotalents

Qu’est-ce que l’outplacement ?

Pour ceux et celles qui ne connaissent pas sa mission, l’outplacement est un métier bien spécifique qui ne s’adresse pas seulement aux cadres mais peut être proposé à chacun ou chacune qui le souhaite dès lors qu’il ou elle ressent le besoin de se faire accompagner dans son retour vers l’emploi.

C’est un protocole d’accompagnement bien précis où la relation entre le consultant et la personne accompagnée travaille sur un mode collaboratif. La problématique est celle d’un retour vers l’emploi. Ce dernier peut se faire dans un poste salarié ou par le biais d’une création d’entreprise, ou bien encore en passant par une formation.

Aussi lorsque nous disons chez Eurotalents que nous ne sommes ni psy ni gourou, c’est parce que nos méthodes et notre action s’intéressent plus à l’employabilité et au potentiel de carrière de chaque individu au regard de la solution qu’il vise, qu’à d’autres aspects de sa personnalité que nous ne savons pas traiter, et, qui relève, selon nous d’autres expertises ou d’autres postures.

Une construction stratégique

En outplacement, le processus d’accompagnement individuel respecte des étapes bien identifiées de reconstruction d’un lien social professionnel dont il faut comprendre les mécanismes, car le retour vers l’emploi n’est ni plus ni moins qu’un acte de socialisation auquel nous avons été préparés (ou pas) au cours de notre éducation. Le consultant en outplacement doit donc comprendre et maîtriser le mécanisme de ce lien social et l’intégrer dans son conseil.

Mais l’outplacement n’est pas seulement ce travail réflexif entre un individu et le consultant sur son rapport à l’autre dans le sens du lien social, il est ensuite toute une construction stratégique associant avec discernement des outils marketing, un discours « commercial », une compréhension de son offre au regard d’un marché, la maîtrise des nouvelles technologies dans la recherche d’une nouvelle activité ou d’une création de sa propre entreprise.

Enfin, l’outplacement est un partage de vision et d’informations à travers lequel se construit une relation sociale respectueuse de l’engagement pris de part et d’autre entre le consultant et la personne accompagnée. Où la confrontation peut parfois surgir, la discussion peut souvent s’enrichir, avec pour seule finalité de coller au plus près de la réalité de chaque individu dans la solution qu’il finit par trouver.

Chômage, ils n’ont pas tout essayé !

Pourtant depuis qu’il existe et s’est installé dans notre société, qu’ils soient de droite ou de gauche on ne peut guère leur reprocher d’avoir cherché, proposé, orchestré des solutions. A lire la presse, entendre les spécialistes, le chômage est éminemment politique au point que l’on semble perdre de vue l’humanité qui se cache derrière lui. On s’envoie à la face des statistiques, on se réjouit de l’échec de l’autre camp, on se lance sur la solution innovante de la dernière chance, sans pour autant avoir posé le vrai fond du problème. On montre ainsi son impuissance.

Pourtant, les ressources, les énergies, les moyens sont là, mais là encore faute de partir du bon diagnostic, on privilégie toujours les mêmes spécialistes qui n’ont jamais fourni les bons remèdes. Faute de l’avoir guéri ou de l’avoir traité correctement, les boucs émissaires sont alors tous trouvés, et, selon son bord politique, à chacun, chacune, sa vision du responsable.

Pourtant, les ressources, les énergies, les moyens sont là, mais faute d’une vraie volonté politique de se saisir de la question, on continue de tourner en rond.

Et s’il y a un début d’idée dans ce mouvement circulaire que nous observons en les voyant ainsi agir. Force est de constater qu’ils n’ont jamais essayé de voir le chômage dans sa réalité pour lui construire une politique à sa mesure.

De toutes les sciences qui se sont penchées sur la question du chômage, la sociologie est sans doute celle qui nous éclaire le mieux sur le sujet, à la condition toutefois, de vouloir l’associer à une expertise terrain.

En commençant par nous rappeler que le travail est un acte de socialisation par lequel nous construisons notre identité. Et qu’en son absence nous pouvons sombrer dans une mort sociale, avec les conséquences sociétales que nous pouvons observer.

Qui dit acte de socialisation dit rapport entre un acteur et son écosystème, par le biais d’interactions dans un processus de plus en plus institutionnalisé, codifié, aujourd’hui digitalisé où faute de savoir se différencier, on se fera amalgamer.

Ainsi lorsque l’on perd un emploi, c’est à l’ensemble de ces notions que nous touchons.

La perte d’un emploi porte atteinte à notre identité, en niant la fonction, le métier que nous occupions avant. Il faut donc engager une dynamique circulaire qui nous permettra de retrouver un nouvel emploi et de nous construire une nouvelle existence.

L’accompagnement individuel du chômeur permet de valider la réalité de ce processus de reconstruction par lequel il faudra passer.

Or, aucune politique sur le chômage ne semble prendre comme point de départ ce mécanisme de construction identitaire. Le plus souvent elles partent de notions collectives, d’indicateurs erronés, de stigmates, de comparaisons (statistiques en tout genre, chômeurs longues durées, étrangers, plus de 50 ans) pour mettre en place des solutions. Pourtant, la même sociologie a fait un constat sur la question du chômage en nous rappelant que: Les chômeurs ne forment pas un groupe homogène et spécifique, et qu’à ce titre il est difficile d’en donner une analyste robuste.

C’est pourquoi chez Eurotalents, nous préférons l’approche individuelle à laquelle nous associons une méthodologie où nos acteurs chômeurs apprennent à maîtriser la réalité de leur marché pour retrouver une position professionnelle et une identité réelle qu’ils pensaient avoir perdu.

La vie sociale du chômeur

La vie sociale du chômeur

Une idée reçue veut qu’inactif le chômeur sombre systématiquement dans une mort sociale. Et depuis cette étude de 1932 réalisée par Paul Lazarsfeld, il semblerait que cette perception n’ait pas beaucoup changé.

Pour autant si l’on y regarde de plus près, en 2016, le numérique et le digital pourraient être un remède à l’exclusion sociale du chômeur, en lui permettant de rester en contact avec les actifs via des plateformes ou autres réseaux sociaux.

Mais tout comme à l’époque de Lazarsfeld, considérer qu’un lien social suffit pour ramener à la vie un chômeur serait une erreur aux vus des retours d’expériences que nous avons reçu sur nos accompagnements.

Dans la réalité des faits, la perte d’un emploi est sans doute comparable à ce que d’autres chercheurs en sociologie ont décrit sur les impacts d’un choc biographique et le processus qui permet de s’en remettre.

Et ce que l’on découvre sur le terrain, est que ce n’est pas tant le lien social qui permet le retour à la vie active du chômeur, mais bien davantage, le mécanisme de réflexion que ce lien social déclenche chez l’individu à chaque confrontation de sa vision du monde à une réalité professionnelle, en lui permettant de construire son retour vers une vie sociale.

Dans certains contextes et pour certains sujets, c’est précisément ce mécanisme de réflexion qui est stimulé dans une mission de conseil en outplacement, et pour que ce mécanisme soit performant, force est de constater qu’il fonctionne néanmoins sous certaines conditions, chez les personnes accompagnées par Eurotalents.

Ainsi, alors que nous pensions qu’au terme de leur recherche, elles nous diraient : « vous m’avez été utile pour les outils sous-entendu (le CV, les courriers, les préparations aux entretiens), celles-ci m’ont déclaré très souvent : « c’est dans la confrontation des idées aux différentes étapes de la conduite du projet que vous m’avez été précieuse, car au fur et à mesure que nous progressions dans la démarche, je comprenais ce que je voulais faire vraiment».

En outplacement les projets sont de toutes natures, ils peuvent s’inscrire dans une recherche d’emploi, un projet de création d’activité, une formation. Il faut être rompu aux techniques d’accompagnement de ces projets et comprendre les motivations de chacun dans ses choix.

Voir les statistiques du chômage autrement ?

Voir les statistiques du chômage autrement ?

Selon les positions de ceux qui les présentent ou bien selon les pourcentages dans lesquels elles veulent nous classer, les statistiques ont cette capacité de nous faire basculer dans le camp des gagnants ou celui des perdants. Pour autant, face à ce qu’elles nous apprennent en se drapant de la vertu du nombre, selon que l’on se trouve du bon ou du mauvais côté du chiffre, aussi petites ou grandes que soient nos chances, elles n’ont aucun pouvoir sur l’interprétation que nous pouvons en faire individuellement et encore moins sur notre volonté d’agir pour les combattre lorsqu’elles tendent à nous nuire.

Chaque mois, le chiffre du chômage nous est annoncé dans les médias et donne lieu selon les contextes à des commentaires avisés. Dans la réalité des faits, comme les études sociologiques l’ont démontré, le chômage ne forme pas un groupe homogène et spécifique et le premier combat du chômeur et du consultant en outplacement est sans doute de lutter contre le poids des idées martelées.

Le chômage est en vérité une réalité dans laquelle un individu peut basculer et, selon le contexte dans lequel il se trouve, il lui faudra ou non du temps pour trouver une issue. Pour l’aider dans cette phase, l’outplacement est un conseil qui peut répondre à sa difficulté, pour autant qu’il développe des méthodes, des approches qui tiennent compte de la réalité de chacune et chacun au regard de son contexte.

Le Blog d’Eurotalents veut se faire l’écho d’expériences tirées du terrain sur des sujets en lien avec des retours vers l’emploi. A contrario des statistiques globales ou des typologies sociales du chômage, il n’a pas vocation à édicter des règles qui s’appliquent à tout le monde. Au travers de portraits d’acteurs ou de sujets ayant trait au métier de conseil en « outplacement », le blog d’Eurotalents vise à inverser le regard posé sur des catégories définies par les statistiques, tandis que l’expérience du conseil et le succès des chômeurs nous montrent chaque jour généralement l’inverse.